Biographie

Le 14 décembre 1914, Georges Arditi (né Arditti) naît à Marseille d’Esther Asseo, 20 ans, née à Salonique et de David Arditti, 35 ans, né en Bulgarie. La sœur de David Arditti, Mathilde Canetti née Arditti, est la mère d’Elias, Jacques et Georges Canetti. Viendront ensuite, Joseph dit « Poulou » en 1915 né à Paris puis Jacques en 1916 à St Germain- en-Laye, Daniel qui ne vécut que 4 ans et enfin Denise en 1923. Pendant la 1ère guerre mondiale, la famille est installée dans l’appartement de Bella Asséo, mère d’Esther, place Wagram.

Après la guerre, la famille Arditti s’installe au 45 rue Ampère, et accueille pendant 2 ans la sœur d’Esther, Laure, son mari Lazare Saïas, médecin, et leurs fils Raymond et Guy, qui viennent d’arriver de Salonique. Les affaires de David Arditti périclitent au sortir de la guerre : le cours de la soie qu’il avait achetée en grande quantité pendant la guerre s’effondre et entraîne la faillite familiale. L’héritage du grand-père Arditti leur permet néanmoins de subvenir à leurs besoins.

Georges entre au lycée Carnot en 7ème à 10 ans, où il s’ennuie jusqu’à la terminale, sauf en cours de dessin, de Français et de Latin. Pendant ces années de lycée, il se passionne pour le tennis autant que pour la peinture, et découvre les peintres flamands. Il échoue au bac, puis entre à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs.

1932, il a comme professeurs Emmanuel Fougerat, André Devambez, Jean Dupas, et Raymond Legueult. Puis l’école crée un cours avec le peintre affichiste Cassandre, que Georges suit assidûment.

Eté 1934, Jacques meurt noyé aux Sables d’Olonne sous les yeux de son frère Georges.
A la rentrée, par souci d’économie, la famille retourne vivre dans l’appartement de la place Wagram à Paris.

1935, Georges Arditi est embauché par son oncle Edgar comme homme à tout faire au sein de sa société de radiotéléphonie, et contribue ainsi aux finances de la famille.
Il continue à peindre le samedi et le dimanche dans la chambre qu’il partage avec son frère Joseph.

1937, Il fait sa première exposition particulière dans la galerie La fenêtre ouverte située rue Lincoln à Paris et dirigée par le peintre espagnol Rafael Durancamps3. Il y croise Salvador Dali. Il illustre un certain nombre de nouvelles pour le Journal de Léon Bailby, L’Intransigeant. Ses dessins sont remarqués par le peintre Zarraga qui le signale au critique Pierre du Colombier.

Enthousiasmé par la lecture de Jean le bleu, il écrit à Jean Giono pour lui demander s’il pense qu’un citadin comme lui peut vivre à sa manière en Provence. Giono lui fait parvenir une réponse par son épouse, et l’invite à faire un essai chez lui au Contadour, mais Georges Arditi n’ose pas.

Malgré une économie fragile, la famille ne cesse de partir en vacances en Normandie, dans le sud ou en Bourgogne, et rencontre à cette occasion la jeune bourgeoisie de l’époque : Bernard Citroën, Jacqueline de Dampierre, l’aristocratie russe… C’est dans ces cercles que Georges fait la connaissance de Francis Harburger à Saint Honoré les Bains (Nièvre), avec qui il peint une série de petits paysages qui seront volés pendant la guerre par les nazis.

1938, il est vivement encouragé par Pierre Vorms, l’un des directeurs de la Galerie Billiet-Worms (rue La Boétie à Paris) qui se propose de suivre son travail.

Cette même année il est invité pour la première fois au Salon des Tuileries : il envoie un Autoportrait au cou très long, torse nu.

Cette toile fit écrire à Pierre du Colombier : « Retenez bien le nom d’Arditi, il est encore noué mais il est fort. » Il cesse de travailler pour son oncle et se consacre à la peinture.

1939, il devient l’assistant de Cassandre à la suite de Savignac.

Mais la déclaration de guerre lui fait perdre les appuis qu’il commençait à obtenir.

Bien que réformé pour des raisons de santé, il tente de s’engager, sans succès. Alors qu’il se déclare juif auprès du gouvernement de Vichy, il refuse de porter l’étoile jaune et convainc sa famille d’en faire autant.

1940, Georges Arditi et sa famille prennent le dernier train au départ de la gare de Lyon pour le sud de la France, qui s’arrête à Aurillac. Dans le petit hôtel où la famille descend, il fait la rencontre d’Yvonne Leblicq. De 8 ans son aînée, elle est en vacances avec sa famille bruxelloise. Ils tombent immédiatement amoureux. Pendant cette courte période, il fait de nombreux portraits à la mine de plomb, dans un style très proche des portraitistes de la Renaissance. L’exposition et la vente de ces dessins complètent les revenus de la famille et financent le retour des Leblicq à Bruxelles. Après leur départ, Georges Arditi retourne à Paris, en zone désormais occupée. Il y peint de plus belle, notamment son autoportrait ainsi que des natures mortes. Yvonne l’y rejoint à plusieurs reprises.

1942, il passe la ligne de démarcation à Châteauroux pour rejoindre la famille à Marseille. N’ayant plus de nouvelles d’Yvonne, il décide d’aller la chercher à Bruxelles, contre l’avis de ses amis et de sa famille. Il prend un train pour Lons-le-Saunier, en zone interdite. Il atteint Bruxelles à pieds grâce à un passeur, en évitant les balles de justesse. Yvonne accepte de le suivre, rassemble quelques affaires et ils repartent tous deux dans l’autre sens. Ils arrivent à Marseille quelques jours après.

Par l’intermédiaire de la Galerie Garibaldi et de Jean Ribourd, décorateur de la Comtesse Pastré, sa peinture suscite un vif intérêt parmi les amateurs d’art marseillais et parisiens. Cette même année, l’appartement place Wagram est pillé par les officiers nazis, une cinquantaine de toiles volées et des scellés sont apposés sur la porte.

1943, le jeune couple remonte à Paris, et loue un appartement cité des Fleurs dans le 17ème. Au cours de cette période il produit intensément. Le Crépuscule marque le point culminant de la première période de son œuvre que l’on pourrait qualifier de quattrocentiste.

Le Crépuscule, 1943, marque l’apogée de sa période quattrocentiste

En décembre de cette année, Georges Arditi perd son frère « Poulou », dont il était le plus proche : celui-ci est arrêté à La Cadière (Var), puis déporté vers Auschwitz dont il ne reviendra pas.

Georges sous-loue son appartement à Pierre Kahn-Farelle qui organisait alors le réseau des faux papiers de la résistance française. Ce dernier leur permet en retour de louer un autre appartement rue de la Cerisaie. Pierre Kahn-Farelle, dit Pierre-des-faux-papiers, est à la tête d’une véritable petite usine occupant 25 camarades, jusqu’à l’arrestation et la fusillade en mars 1944 de 11 d’entre eux, y compris Pierre Khan, Cité des fleurs. Prévenu au dernier moment, Georges Arditi échappe de peu à cette arrestation.

Pierre Arditi naît quelques mois plus tard, le 1er décembre 1944.

A la libération de Paris, en allant se renseigner sur son frère Joseph au Mouvement National des Prisonniers de Guerre et Déportés (MNPGD), Georges Arditi fait la rencontre de José Period, jeune femme d’origine péruvienne et amie de Marguerite Duras. Elle sera son amante pendant 7 ans, et tient une place importante dans sa vie. Il fait plusieurs fois son portrait, ainsi que celui de Marcelle, sa fille.

Le 14 février 1946, Yvonne et Georges donnent naissance à Catherine Arditi.

La Galerie du Bac (qui venait alors de découvrir Bernard Lorjou) lui fait un contrat et l’expose parmi les autres peintres qu’elle représente. A partir de cette époque, il participe régulièrement au Salon d’Automne et à diverses expositions de groupe, en France et à l’étranger.

Les années suivantes représentent une période d’évolution au cours de laquelle Georges Arditi abandonne peu à peu le modelé en volume pour une peinture en aplat, d’inspiration post- cubiste. Il est invité au Salon des Tuileries.

1948, Léon-Paul Fargue lui confie l’illustration de son manuscrit, Les Grandes Heures du Louvre.

1949, très soutenu par les critiques Louis Cheronnet et Waldemar George, il expose à la Galerie Visconti, dirigée par Maurice Garnier. Sa toile Le Repas paysan est retenue pour la sélection finale du Prix de la peinture contemporaine organisé par le journal Opéra.

Il montre son travail au sein du groupe Rythmes et couleurs à Poitiers ; puis à l’exposition Peintres de la terre organisée par Waldemar George à Figeac.

1950, le Musée d’Art Moderne de Sao Paulo au Brésil lui consacre une importante exposition particulière.

Photo de l'Exposition Georges Arditi au Musée d'Art moderne de Sao Paulo en 1950
Exposition Georges Arditi au Musée d’Art moderne de Sao Paulo en 1950
Fresque commandée par l'Etat pour le Lycée Technique de Versailles en 1950
Fresque commandée par l’Etat pour le Lycée Technique de Versailles en 1950

L’État lui commande une décoration murale pour le Lycée technique Jules Ferry à Versailles. Comme chaque année, il expose au Salon d’Automne et est invité au Salon des Tuileries.

1951, ses toiles sont sélectionnées pour le Prix de la Critique et pour le Prix de la Jeune Peinture. Il expose dans de nombreux groupes.

1952, un séjour de 6 mois dans la région d’Aix-en-Provence accompagne une évolution décisive dans son œuvre. Il rompt avec la vision directe de la réalité, peint par plans décomposés. La couleur préside. La Machine à coudre, La Classe, Nature morte à la Pastèque ou encore Les Grues comptent parmi les toiles les plus caractéristiques de cette période. Au cours de ce séjour, il tient un journal quotidien qui reflète l’intensité de ses interrogations et l’évolution de sa démarche.

Il expose à Aix-en-Provence à la Galerie de l’Ancienne Madeleine.

Arbres, 1953. Musée de Châteauroux
Nature morte aux pastèques, 1952. Acquisition Fonds National d’Art Contemporain. Ministère de la transition écologique et solidaire, Paris.

1953, il est invité au Salon de Mai et participe à de nombreuses expositions de groupe en France et à l’étranger. Il entre à la Galerie Willand-Galanis. Pour subvenir aux besoins de la famille, il devient également régisseur des tournées de son cousin Jacques Canetti: il part avec Sydney Bechet, Jacques Brel, Catherine Sauvage, Lil Armstrong…

Photo du Programme d'un spectacle des Trois Baudets,
Programme d’un spectacle des Trois Baudets, sur lequel Arditi était régisseur
Photo du décor de la pièce "Les bonnes manières"
Décor pour Les bonnes manières, mise en d’Yves Robert aux Trois Baudets, 1951

1954, l’État lui commande une tapisserie, Les Bateaux, qui sera tissée aux Gobelins. Il expose au Salon de mai Nature morte aux poissons.

1955, il est invité à participer à l’exposition Découvrir à la Galerie Charpentier. Cette même année, son travail est présenté à la première édition du Salon Comparaisons et de manière régulière les années suivantes. Il est nommé sociétaire du Salon d’Automne.

1956, il fait une exposition particulière au Musée de Châteauroux, et une autre à la Galerie Landwerlin de Strasbourg. Il participe également à une exposition de groupe en Norvège.
Il participe à un groupe avec Vincent Guignebert, Camille Hilaire, Pierre Lelong pour la galerie Mourgue.

L’État lui commande une autre tapisserie, Le Port, qui sera tissée à Aubusson.

Il travaille toujours avec son cousin Jacques Canetti en tant que régisseur et décorateur aux Trois Baudets, à Paris, où il fréquente Brel, Devos, Vian, Gainsbourg,.. à leurs débuts. Il réalise également des décors pour le Théâtre du Vieux Colombier et le théâtre de la Huchette, entre autres.

Photo de Georges Arditi et Georges Mouloudji aux Trois Baudets
Georges Arditi et Georges Mouloudji aux Trois Baudets

1959, ses recherches qui avaient pris naissance lors de son séjour en Provence sont poussées jusqu’à ce que le sujet disparaisse ; sa peinture rompt avec la figuration. C’est dans cette nouvelle disposition qu’il fait son exposition particulière à la Galerie Berri-Lardy, sur le thème du Mont Ventoux aux différentes heures de la journée.

Il expose à Montpellier avec les peintres Marcel Mouly, Camille Hilaire, François Bret, Marcel Burtin, Jean-Raymond Bessil, à la Galerie Art et décoration.

1960, l’Académie Julian4 lui confie la création et la direction d’un atelier non figuratif au sein de l’école. Il est invité à l’exposition Les Grands et les jeunes d’aujourd’hui au Musée d’Art Moderne de Paris.

Sans titre, autour de 1960. Collection Musée Estrine, Saint-Rémy de Provence

Il expose à la Galerie du Fleuve avec Edouard Pignon, Pierre Tal Coat, Hans Hartung avec lequel il se lie d’amitié.

1961, il expose à la Galerie Berri-Lardy une seconde fois et est de nouveau invité au Salon des Grands et des Jeunes d’aujourd’hui au Musée d’Art Moderne. La densité de la composition et le mouvement sont au plus fort entre 1970 et 1973.

A la fin des années 60, il coordonne trois opérations de construction immobilières dans Paris.

1970, il rencontre Nicole Paroissien, jeune femme de 26 ans, qui devient son amante. Il la peint à plusieurs reprises et séjourne avec elle dans le sud de la France chez des amis.

1971, Georges Arditi perd son ami et cousin Georges Canetti, médecin chercheur en biologie, avec qui il entretenait une correspondance nourrie. Il se marie avec Yvonne Leblicq.

1972, il expose dans la galerie de Camille Renault, mécène et collectionneur d’art.

1974 signe le retour à une peinture figurative. Dans cette quatrième période, les volumes, la lumière et les couleurs redeviennent paysages, natures mortes, portraits ou scènes oniriques composés de plusieurs personnages. Les femmes nues y font leur apparition, souvent sous un jour cru, leur corps est un sujet très présent de cette période figurative.

Tableau Portrait de Jacques-Henri Lartigue, 1978
Portrait de Jacques-Henri Lartigue, 1978. Acquisition du Fonds National d’Art Contemporain. Ambassade française de Canberra

Le 6 mai 1974 naît Danièle Arditi, première fille de Nicole et Georges, suivie de Rachel Arditi, née le 28 juillet 1976. Georges Arditi s’occupera en secret de ses deux filles pendant 8 ans.

Le 15 novembre 1982, Yvonne décède d’un cancer, laissant le peintre dans une douleur telle qu’il arrête de peindre pendant plusieurs mois.

1983, un violent infarctus le laisse entre la vie et la mort pendant plusieurs jours. Lorsqu’il en émerge, il adresse une lettre de treize pages au président de la République François Mitterrand sur le projet de la Pyramide du Louvre, qu’il déplore.

1984, la Mairie de Paris lui commande un mur peint à l’angle de la rue du Mont Cenis et de la rue Duc, dans le 18ème arrondissement. Il peint Portrait de famille, qui réunit les quatre enfants, le peintre et deux de ses petits enfants. GlassexLes deux amies ou encore Le Cri, les Hommes en marche font aussi partie des peintures importantes de cette période très productive.

1988, il fait la rencontre du couple Bruno et Christine Colas, qui expose une vingtaine de ses toiles à la galerie Christine Colas à Paris. Bruno Colas est l’un des héritiers de la collection Max Pellequer.

Sa sœur Denise, dont il a fait plusieurs portraits, décède d’une crise cardiaque à la clinique de La Borde, où elle séjournait depuis 1960.

1990, Bruno et Christine Colas organisent la première rétrospective de son œuvre au Musée de la Poste. François Mitterrand visite l’exposition et deux ans plus tard le décore du titre de Chevallier de la légion d’honneur.

Au cours de cette période, une dizaine de toiles sont envoyées en Russie par l’intermédiaire d’un marchand d’art pour y être exposées. Les toiles ne reviendront jamais.

2002, il publie La Peinture des peintres dans la collection Carré d’Art aux éditions Séguier. Plus de soixante-dix ans après avoir commencé à peindre, il entame une cinquième période, qu’il n’aura pas le temps d’étoffer : les formes s’interpénètrent de nouveau. Les couleurs et la lumière tiennent lieu de perspective et à nouveau, comme une réminiscence de sa période post-cubiste, le réel s’éloigne.

2006, atteint de la maladie d’Alzheimer, il entre à la maison des artistes à Nogent-sur- Marne, où il ne peint plus.

2009-2010 quelques portraits des enfants dont Portrait de famille sont présentées dans le cadre de l’exposition Les enfants modèles – De Claude Renoir à Pierre Arditi, au musée de l’Orangerie. Emmanuel Bréon, alors directeur de l’Orangerie en est le commissaire.

Cette exposition ira ensuite à Kyoto.

Il meurt le 15 janvier 2012, à la maison des artistes de Nogent-sur-Marne.

Georges Arditi laisse une œuvre de près de 800 tableaux et plus de 1000 dessins signés. Certaines ont été acquises par le Conseil d’Etat, l’Hôtel de ville de Paris, le Centre National du Commerce Extérieur, le Mobilier National, Le Musée des Beaux-Arts Pouchkine à Moscou, La Tate Gallery à Londres, entre autres. Ses toiles figurent dans des collections particulières en France et à travers le monde, notamment à Londres, Sao Paulo, Mexico, Genève, Lausanne, New-York, Milan.